Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     PAIN     
FEW VII panis
PAIN, subst. masc.
[T-L : pain ; DÉCT : pain ; FEW VII, 543b-545 : panis]

A. -

Au propre. "Pain" : ...À quoy proffite et vault forment Pain composé de bon forment, Pur, convenable et esléu Et en bonne terre créu, Et soit le pain levé et cuit Moyennement, autrement nuist, Nompas trop vielx, n'aussi trop froiz ; Mais cuit d'un jour, ou deux ou troiz, Contenant un pou par manière De bren ou orge en sa matière (LA HAYE, P. peste, 1426, 89). Car tout pain moult délicatif Est par nature opilatif (LA HAYE, P. peste, 1426, 90). Cestui predist sur la revolucion de l'an la longue famine et la calamité de plusieurs ans et les grans maulx qui par icelle viendroient, car les plus fors tolloient le pain aux febles et se firent grandes incensions et les riches furent fort vexés par les pouvres. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 113 v°).

 

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Miette de pain : Vous avez l'example du riche qui refusa une miette de pain, et on lui reffusa une goutte de eaue. (GERS., Annonc., a.1400, 238).

 

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Estre du pain et de la table de qqn. "Faire partie de la domesticité de qqn" : Item, ont pasnage en ladicte forest pour leurs pors pour leurs garnissemens et de leurs servans qui sont du pain et de la table des moynes. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 90).

 

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Estre mis au pain querre. "Être réduit à mendier" : Et suppose qu'il [le pauvre plaignant] ait sentence pour lui les commissaires pour eulx et pour les notayres en emporteront cent francs, et conviendra que cellui qui a eu la victoyre en parlement de son plaint soit desert et aucunesfoiz mis au pain querre. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 502).

 

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Prov. Il vaut mieux vivre sans pain que sans justice : Il devroit souvenir aux patrons du proverbe des vieilles des Sarrazins qui dient ainsi communement, Il vault mieulx vivre sans pain que sans justice. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 589).

 

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[Différents pains]

 

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[P. oppos. à pain blanc] Pain bis. "Pain courant de qualité inférieure" : ...mais que la personne se garde des contraires, comme il fu dit dessus en l'art de medecine, et souverainement au prendre le Gastelet alis ["l'hostie"] qui donne vraye santé plus que ne fait le pain bis. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 302). ...et toutesfoiz il sembla que le monde et par espicial les crestiens catholiques, facent la sourde oreille et soyent ennuyez de blanc pain. Et pource est il expedient que le pain bis qui est lassatif, c'est assavoir cestui foible dicte, de nouvel leur soit presente (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 97).

 

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[Dans un cont. fig.] Pain blanc : ...et toutesfoiz il sembla que le monde et par espicial les crestiens catholiques, facent la sourde oreille et soyent ennuyez de blanc pain. Et pource est il expedient que le pain bis qui est lassatif, c'est assavoir cestui foible dicte, de nouvel leur soit presente (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 97).

 

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Pain aux chiens. "Pain grossier pour les chiens" : ...item, les autres doivent porter le blé au moulin pour fere le pain aux chiens, et les autres doivent fourner le pain (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 98).

 

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Pain de couvent. "Pain de qualité supérieure semblable au pain de chapitre (?)" : Item, sont tenus païer un septier d'avoine à l'ancienne mesure, cinquante harens, cinquante chandelles de cire de demi pié de long, XXV pains de couvent, un septier de vin de couvent, et ne les doivent fors une fois l'an (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 4).

 

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Pain faitis. "Pain un peu moins fin que le pain blanc" : ...ung pain festierz [l. faitis] à Noël, quatre ouefs à Pasques, un froumage en may, et une geline à la my aoust, tout à celui qui tendra le ramage de ladicte forest. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 221). Et pour ce sont tenuz païer chacun an iceulx paroissiens au terme de la saint Remi un boessel de blé, un pain fetiz à Noël, IIII eufz à Pasques. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 223).

 

Rem. V. aussi faitis.

 

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Pain tosté : Ilz doivent prendre et boire, au main, Un peu de vin, plaisant et sain, Qui de bonne oudeur soit doté O un petit de pain tosté. (LA HAYE, P. peste, 1426, 100).

 

Rem. Cf. F. Lecoy, Mél. A. Lombard, 1969, 101-107.

B. -

RELIG. "Hostie" : Aucune fois signifie une maniere de mutation et treschangement d'une substance en l'aultre, comme quant on dist que le corps de Jhesu Crist est fait du pain de l'ostie. (Somme abr., c.1477-1481, 110).

 

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Pain à chanter. "Hostie non consacrée" : Et avecquez ce doivent [les religieux] avoir deux foux par an à Noël en l'office du secretain du lieu pour le pain à chanter en ycelle église. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 298).

 

Rem. Ce synt. se trouve ds FEW II-1, 220b : cantare, il manque ds FEW VII, 545a : panis.

 

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Pain sacré : ...et par leur grant charité prenderont garde [le prieur et les frères], quant il sera tamps qu'il soit repeus du pain sacré celestial qui donne vie as angeles (MÉZIÈRES, Test. G., 1392, 315).

 

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Pain de vie : ...car le Createur de toutes creatures singulierement avoit creé cestui noble vaissiau pour recevoir et herbergier en lui le Pain de Vie qui donne vie aux angres et aux hommes, c'estoit son propre corps, en cestui vaissiau precieux. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 128). ...Beau Filz, tu doys recevoir le saint sacrement de l'autier, le pain de vie qui donne vie aux anges et aux hommes et a toutes les creatures, pour le remede de ta fragilite et de tes pechiez quotidiens (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 263). ...especiaument a l'eure que par grace il devera recevoir le pain de vie, le Saint Sacrement de l'autel (MÉZIÈRES, Test. G., 1392, 311).

 

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Pain de sapience : Lors li metras la table de sobresse, la chandelle de vray[e] foy, le pain de sapience, le vin de compunccion, le sel de discrecion, le fruit de bonnes oeuvres. (GERS., Pent., p.1389, 84).
 

Littérature didactique Hiltrud Gerner


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